lundi 13 décembre 2010

Présentation du blogue Victor Hugo et les Romantiques

Ce blogue se veut un outil interactif permettant une lecture dirigée d'un extrait du roman Les Misérables de Victor Hugo, en l'occurence celui ou le personnage de Jean Valjean, qui a promis a Fantine de sauver son enfant [Cosette], se présente incognito chez les Thénardier pour l’acheter à vil prix (p. 140-154).

Ce site est réservé à ceux et celles participant, avec moi, au cours Littérature et écriture. Il vise à préparer adéquatement les étudiants à l'exercice d'analyse littéraire auquel ils devront s'adonner comme épreuve finale, en fin de session. Cette analyse portera sur l'un des extraits du roman de Victor Hugo que nous aurons lus cet automne.

Je vous encourage à y aller de vos commentaires et de vos questions par rapport aux quatre thématiques retenues (et aux pistes suggérés en italique) et qui sont à la fois des caractéristiques communes au roman lui-même et au Romantisme.

Je joins finalement à cette présentation le lien suivant :
http://www.ccdmd.qc.ca/fr/epreuve_francais/?id=31

Vous y retrouverez les exercices qu'abrite le site du CCDMD (Centre collégial de développement de matériel didactique) relativement à la dissertation et qui constituent une excellente préparation pour l'épreuve finale.

Bonne lecture et bonne préparation!

Présentation de Victor Hugo




* Les images utilisées sont allégées .
* Cette biographie est largement inspirée par la présentation que font Patrick Berthier et Michel Jarrety de Hugo dans leur ouvrage "Histoire de la France littéraire", Modernités XIXe-XXe siècle, Paris, Presses universitaires de France, 2006

Victor Hugo naît le en 1802 à Besançon. Sa mère est originaire de Nantes et son père, officier de l' armée Napoléonienne (il deviendra Général d' Empire) est lorrain. Au gré des affectations de son père, il passera son enfance de ville en ville. En 1812, un tumultueux stationnement en Espagne de toute la famille conduit à la séparation de ses parents. Il sera élevé en compagnie de ses deux frères par sa mère.

Élève au Lycée Louis le Grand, Victor Hugo montrera très rapidement ses dispositions intellectuelles. Dès 1815, il s' écrie : "je veux être Chateaubriand ou rien !" En 1819, il s' éprend d' Adèle Foucher et l' épousera en 1822 malgré l' opposition de ses parents. Son frère Eugène, malade de jalousie sombrera peu à peu dans la folie.

Tout en participant à de nombreux concours poétiques, il se met à fréquenter les milieux littéraires et fait la connaissance d' Alfred de Vigny et de François René de Chateaubriand. Ses facultés naturelles de meneur l' amènent progressivement à devenir animateur d' un cercle qui s' appelera "le cénacle" et réunira les jeunes écrivains comme Alexandre Dumas, Gérard de Nerval, Alfred de Musset, Sainte Beuve. Au sein de ce mouvement littéraire, il s' affirmera romantique et libéral et comme chef de file s' attirera les critiques violentes des tenants de l' académisme.

Parallèlement à son activité artistique, la vie de Victor Hugo connaît de nombreux déboires affectifs et subit le drame de la mort de sa fille Léopoldine. C' est pour compenser ses déceptions qu' il se jettera vraisemblablement dans la politique. Sous la Monarchie de Juillet, il recherche la consécration en demandant son admission dans l' Académie Française. Il lui faudra cinq tentatives infructueuses pour l' obtenir cinq ans plus tard en 1841. En 1845, il sera nommé à la Chambre des Pairs alors qu'en 1848, la France entre dans la IIème République et la vie politique de Victor Hugo rencontrera un tournant. Il est élu député à L' Assemblée Constituante . S' il se montre dans un premier temps favorable au prince-président Louis Napoléon Bonaparte, il rejoint très vite l' opposition en se rapprochant de la gauche républicaine. Hugo ne tardera pas à s' opposer à la peine de mort et à lutter contre les injustices sociales.

Son oeuvre, Les Misérables est déjà en chantier lorsqu' éclate la Révolution de 1848. Lors du coup d' état du 2 décembre 1851, aux côtés des Républicains dont Hyppolyte Carnot, Victor Schoelcher , il incite le peuple à se soulever. Cette position lui vaudra d' avoir sa tête mise à prix et le contraindra à l' exil à Bruxelles puis Jersey et enfin Guernesey. Cet exil de vingt ans, durant lequel il décuplera sa création littéraire, fera de lui un mythe vivant. Comme poète il se donnera la mission, suivant ses propres paroles de "guider le peuple vers la lumière de la liberté". Malgré l' amnistie décrétée par Napoléon III il persiste avec dédain à rester en exil : "Quand la liberté rentrera, je rentrerai". Il attendra la chute de l' Empire en 1870 pour revenir à Paris.

Il est accueilli triomphalement à Paris le 5 septembre 1870. Durant ses dernières années, il sera le défenseur des communards Idole de la gauche républicaine et écrivain populaire par excellence, il est élu sénateur en 1876. Il meurt le 22 mai 1885. Cet événement prendra une ampleur nationale. Une manifestation grandiose rendra un immense hommage à cet homme qui fut parmi les plus grandes figures de ce siècle. La photo insérée plus bas en rend magnifiquement compte: l'Arc de Triomphe, à Paris, drapée de noir, véritable symbole d'une nation en deuil. De son vivant, son oeuvre mais aussi son personnage avaient déjà acquis une dimension mythique. Il sera inhumé en apothéose au Panthéon.

Contexte, naissance du Romantisme et Les Misérables

Le Romantisme est un mouvement littéraire qui prône de laisser largement place à l’expression des sentiments et des sensations en abolissant les règles strictes de la littérature classique. Il propose de jouer sur les contrastes, sur l’opposition du beau et du laid, du sublime et du grotesque. En ce sens, il préconise la liberté et le naturel en art. Il s’agira donc d’explorer, dans un premier temps, comment se développe le Romantisme, dans le sillage de la Révolution de 1789 dont l’un des acquis a été la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Il faudra parvenir à comprendre ce que représente cette époque charnière pour les écrivains romantiques qui apparaissent dans les années 1830. On voit immédiatement se dessiner la piste de la liberté, au cœur de la Révolution comme du Romantisme. En fait, la Révolution représente un mythe pour les écrivains romantiques. Le mythe a apporté le nécessaire idéologique à leur mouvement, c'est-à-dire la notion d’individu essentiel. Le Romantisme revendique également la singularité et l’originalité de chaque personne. Par ailleurs, la destinée de Napoléon 1er nourrit à cet égard une mythologie de réussite et de destin exceptionnel. Mais après la chute de ce dernier, il n’est plus possible pour les jeunes de cette époque de s’investir dans cette légende et il semble alors que la notion d’héroïsme soit désormais abolie. L’écrivain romantique a le sentiment d’être floué par l’époque qu’il traverse : une époque de désillusion marquée par les échecs et les transformations (retour de la monarchie, naissance de l’ère bourgeoise, essor économique). Les hommes de Lettres condamnés a l’immobilise social en viennent souvent a ressentir un sentiment de mélancolie, une profonde angoisse, sentiment qu’on nomme souvent comme le Mal du siècle. Ainsi, chez l’écrivain romantique, le malaise historique se transforme en une interprétation individuelle et collective de son époque et qui passe obligatoirement par les contrastes entre l’avant et l’après.

Non seulement retrouvons-nous ces mêmes sujets qui façonnent et expliquent le Romantisme dans Les Misérables, mais ils sont explicités, exemplifiés et décrits avec une justesse qui rend habilement compte des différents constats évoqués précédemment. L’extrait du roman qui devra avoir été lu fait précisément ressortir ces différents éléments qu’on peut regrouper sous quatre thèmes principaux, soit Contexte et naissance du Romantisme, Réalisme versus Épopée, Lyrisme et Hymne a l’amour et, finalement, Désillusion et Plaidoyer social.


Réaliser et comprendre pourquoi la littérature est intrinsèquement liée au contexte socio-historique permet de réaliser et comprendre certaines idéologies, points de vue et idées préconçues auxquels l’étudiant sera confronté au cours de son évolution dans la société.

Les Misérables : Réalisme versus Épopée

Les Misérables, comme roman réaliste, décrit tout un univers de gens humbles. C’est une peinture très précise de la vie dans la France et le Paris pauvre du début du XIXe siècle. Son succès populaire tient, entre autres, au trait parfois chargé avec lequel sont peints les personnages du roman. Roman épique, il dépeint au moins deux grandes fresques : la bataille de Waterloo (qui représente dans le roman la fin de l’épopée Napoléonienne et, ce faisant, le début de l’ère bourgeoise) et l’émeute de Paris en juin 1832. Mais le roman est aussi épique par la description des combats de l’âme : les combats de Jean Valjean entre le bien et le mal, son rachat jusqu’à son abnégation ou encore le combat de Javert entre respect de la loi sociale et respect de la loi morale.

Cette thématique tire son importance dans la nécessité, pour l’étudiant, de réconcilier deux univers en apparence foncièrement différents coexistant non seulement dans un même roman, mais bien dans un même courant. Il s’agit d’outrepasser la différence primaire entre ces deux types d’univers et de voir comment la symbiose, dans le contraste, s’opère dans ce macrocosme qu’est le Romantisme; simplement parce que les caractéristiques du genre, telles le thème de l’opposition, le permettent. La difficulté est d’autant plus présente que réalisme et épopée ont été étudiés indépendamment et qu’il faut maintenant accepter et comprendre que certaines de leurs particularités, lorsque réunies, offrent des effets et un rendu sensiblement différents que ce que l’on peut rencontrer dans leurs genres respectifs.

Les Misérables : Lyrisme et Hyme à l’amour

Le lyrisme, dans le discours poétique romantique, aspire à se manifester comme une simple confidence. L’épreuve amoureuse, la confrontation avec le réel, la perte des idéaux, toutes les occasions de larmes sont des chemins vers le lyrisme. À travers celui-ci, le poète romantique tente de dire ses sentiments, ses pensées les plus privées, ses goûts les plus personnels, persuadé que le lecteur y retrouvera, sinon ses propres sentiments, au moins quelque chose d’apparenté à ce qu’il ressent lui-même.

Les thèmes qu’on lui associe peuvent porter à confusion tant ils sont universels et intemporels. L’amour n’est donc pas nécessairement lyrique. Dans Les Misérables, l’hymne à l’amour qu’est la relation paternelle que développent Valjean et Cosette est séparable du lyrisme, alors que l’œuvre elle-même est une hymne lyrique à la patrie signée par un Victor Hugo alors en exil.

Ce thème offre l’occasion de rappeler qu’en littérature, comme dans la vie en générale, les codes et les spécificités s’opposent souvent à une certaine logique dont il faut s’exercer à reconnaître la prédominance.

Les Misérables : Désillusion et Plaidoyer social

Le drame romantique, pour Victor Hugo, est surtout un drame historique. Il prend place à un moment important de l’Histoire d’une Nation, lors d’un mouvement social ou révolutionnaire. Il met souvent en scène le peuple. La passion est l’élément essentiel de ce drame. Et si l’amour et ses sentiments parallèles comme l’amour maternel ou paternel s’opposent, pour les romantiques, à la corruption du monde, le drame romantique veut également susciter une réflexion philosophique et historique. Il replace l’individu dans son rapport complexe avec la société. Des héros solitaires luttent avec le destin. Le héros romantique est toujours un héros déchiré par cette tension s’opérant sans cesse, dans l’univers dans lequel il évolue, entre la perte généralisée des illusions et le sort qui lui est réservé. Le roman engage donc une réflexion sur le problème du mal, plus précisément en ce qui a trait à la mince frontière séparant l’infortuné de l’infâme au sein d’une société où misère, indifférence et système répressif ont un impact inestimable sur les actions et le développement des valeurs d’un individu. L’espoir entretenu par Hugo et les romantiques envers la générosité humaine et dont Les Misérables serait l’archétype se retrouve donc au centre de toutes ces considérations.

Réaliser et comprendre comment, dans son ensemble, Les Misérables fait écho aux signes distinctifs du Romantisme en tant que courant littéraire, c’est constater, par le biais des quatre sujets parcourus dans la leçon, une continuité et un parallélisme reconnaissable autant par la forme employée que par le contenu inséré.